Les résultats des ventes aux enchères les plus récentes confirment une tendance de plus en plus forte du marché concernant les voitures anciennes adjugées en strict état “d’origine”. Lorsque celui-ci apparaît digne de considération, leur valeur s’envole, dépassant souvent celle d’un exemplaire équivalent, restauré à grands frais. Non que les amateurs remettent en cause aujourd’hui la qualité du travail effectué par les professionnels, mais c’est un fait qu’une restauration “concours” ne remplacera jamais une patine 100 % d’époque. Voici dix ans environ, la différence de prix entre une voiture d’origine et la même, intégralement restaurée, tenait compte du coût incompressible du chantier, voire plus encore. Mais avec le temps, le critère d’origine est devenu un “atout” prépondérant aux yeux de certains, et ce n’est pas un “effet de mode”. Un phénomène majeur qui touche désormais tous les grands marchés, en Europe comme aux Etats-Unis. Relayant les grandes ventes aux enchères, les principaux Concours d’Etat internationaux, comme Pebble Beach, reconnaissent parfaitement cette tendance, et accordent aux voitures strictement originales une catégorie à part, un traitement approprié. Après bien des décennies où le culte de la perfection – “mieux qu’en sortie d’usine” – était la règle en matière de restauration, la norme s’inverse aujourd’hui. Tant pis, ou tant mieux si la peinture d’origine paraît quelque peu fanée, ou écaillée par endroits, l’essentiel est qu’elle n’est pas été recouverte par des couches plus récentes. Même constat pour un habitacle. Une sellerie d’origine, même un peu défraîchie, témoigne à merveille des matériaux employés à l’époque et des méthodes de garnissage utilisées. L’état d’origine n’a toutefois qu’une valeur relative. Chaque modèle vendu ainsi doit être considéré comme un cas unique, non généralisable. Une pièce exclusive dont l’état général, l’historique, le kilométrage parcouru et la personnalité des propriétaires successifs feront le prix, quel qu’il soit. Avantage certain : ce nouveau marché ne risque pas d’attirer en nombre les faussaires, même talentueux. Car il n’est rien de plus aléatoire que de vouloir “reproduire” un état d’origine. Comment en effet peut-on “convertir” une épave en voiture “neuve d’origine” ? Si l’on peut tenter de “simuler” une patine d’époque, celle-ci ne résistera pas à un examen approfondi, surtout si le prix demandé requiert l’intervention d’un expert très spécialisé. C’est ainsi : on ne maquille pas l’histoire…
Extrait de l’éditorial de RÉTROVISEUR N° 302 juillet/août 2014